Bonjour M. FERRON,
Connaissez vous la méthode de calcul permettant de déterminer le nombre de bouches d’égouts et/ou avaloirs à positionner sur une voirie ?
Vous remerciant par avance,
Stéphane
1 Réponses
Bonjour Stéphane,
Je vous propose de faire une approche pragmatique puis théorique de la problématique évoquée. Dans nos hypothèses de calcul ci-après, nous allons nous intéresser uniquement aux eaux pluviales générées par le ruissellement sur voirie. Nous devons prendre une marge de sécurité supplémentaire car nous devons intégrer également les rejets au caniveau par le système de “gargouille” (*) correspondant aux eaux pluviales interceptées par les toitures des maisons.
(*) Pourquoi à Saint Nazaire (44) nous privilégions le système de rejets des eaux pluviales de toitures au caniveau par un système de “gargouille” ?
Nous privilégions le système de rejet au caniveau par “gargouille” pour des raisons hydrauliques et hydrologiques. Contrairement au rejet dans une boite de branchement enterrée reliée directement au réseau Eau Pluviale ou le vitesse de l’eau sera importante, le rejet par “gargouille” au caniveau permet d’augmenter “le temps de concentration” et donc “le cheminement hydraulique” de la “goutte d’eau”. Cela contribue à “l’amortissement” du débit de pointe dans le réseau Eau Pluvial car le caniveau se comporte comme un mini “bassin de rétention des eaux pluviales”.
Approche pragmatique :
Sur Saint Nazaire (44), lorsque nous réalisons un projet neuf de voirie, nous avons l’habitude de positionner une grille avaloir tous les 400 m² de voirie. Ainsi, dans le cas d’une voirie de 6 m de large (dont le profil en travers est un profil en toit) disposant d’un trottoir de 2 m, nous positionnons un ouvrage tous les 400 / (3+2) = 80 m.
Certains fournisseurs avancent parfois des ratios à 600 m² soit une grille tous les 120 m dans notre exemple choisi.
Malheureusement dans la documentation commerciale des fournisseurs (exemple : produit DECHAUMONT, ou PAM Saint Gobain – grille avaloir AT profil T) il est difficile de connaitre la capacité d’absorption de l’ouvrage (= débit admissible).
Par défaut, on peut considérer qu’une “bouche d’égout avaloir” à une capacité d’absorption de 40 l/s.
Question : lors d’une pluie de période de retour 10 ans zone rurale, (on prendrait T = 30 ans en zone urbaine), l’ouvrage est il en capacité d’absorber le volume d’eau présent sur les 400 m² ?
Réponse :
Le tableau ci-dessous présente les caractéristiques des pluies décennales et trentennales à Saint Nazaire (44). Elles ont été calculées sur la base des données fournies par la station Météo France de Saint-Nazaire-Montoir de Bretagne :
Période de retour | Coef de Montana |
6 mn – 1 h | 30 mn – 6 h | 2 h – 24 h |
a | 0,643 | 0,857 | 1,836 | |
b | 0,474 | 0,551 | 0,696 | |
1 mois | I (mm/h) | |||
Hauteur (mm) sur 1h) | 5.4 | 5.4 | ||
Hauteur (mm) sur 4h | 10 | 10 | ||
a | 2,072 | 2,858 | 3,915 | |
b | 0,522 | 0,613 | 0,674 | |
2 ans | I (mm/h) | |||
Hauteur (mm) sur 1h) | 13.9 | 13.9 | ||
Hauteur (mm) sur 4h | 23.8 | 23.8 | ||
a | 2,616 | 4,552 | 7,456 | |
b | 0,477 | 0,628 | 0,722 | |
10 ans | I (mm/h) | 32.9 | ||
Hauteur (mm) sur 1h) | 20.9 | 20.9 | ||
Hauteur (mm) sur 4h | 35 | 35 | ||
a | 2,871 | 5,983 | 13,779 | |
b | 0,433 | 0,629 | 0,788 | |
30 ans | I (mm/h) | 43.5 | ||
Hauteur (mm) sur 1h) | 27.3 | 27.3 | ||
Hauteur (mm) sur 4h | 45.7 | 45.7 | ||
a | 2,995 | 7,998 | 28,556 | |
b | 0,375 | 0,63 | 0,872 | |
100 ans | I (mm/h) | |||
Hauteur (mm) sur 1h) | 36.4 | 36.4 | ||
Hauteur (mm) sur 4h | 60.8 | 60.8 |
A titre d’exemple, et de façon simplifiée, pour une voirie de 5 m de large (3 m de voirie et 2 m de trottoir), gérer une pluie décennale c’est gérer 34,2 mm de hauteur d’eau (ce n’est que 3-4 cm au final !!), soit 0,171 m3 par mètre linéaire, donc 17,1 m3 pour 100 mètres linéaires durant 4h.Qu’est ce que cela signifie de façon pragmatique ?
Sur 400 m², le volume de pluie à absorber est de : 400 x 0.0342 = 13.68 m3
Sur 4 h, la “bouche d’égout avaloir” est en capacité d’absorber 40 x 60 x 60 x 4 = 576 000 l soit 576 m3
Sur 1 h (cas défavorable), la “bouche d’égout avaloir” est en capacité d’absorber 40 x 60 x 60 x 1 = 144 000 l soit 144 m3
Sur 6 mn (cas le plus défavorable), la “bouche d’égout avaloir” est en capacité d’absorber 40 x 60 x 6 = 14 400 l soit 14 m3
Conclusion et analyse critique :
On a 13.68 m3 < à 14 m3
Il est donc préférable de prendre une marge de sécurité supplémentaire au ratio énoncé pour prendre en compte :
1) le fait que les calculs sont réalisés pour un “avaloir en charge”, ce qui est rarement le cas …
2) le fait que la capacité d’engouffrement est diminuée en cas de présence de feuilles …
3) le fait que les calculs précédents ne prennent pas en compte les rejets en gargouille. A titre d’exemple, sur 100 ml, si on 4 maisons de chaque côté, soit 8, avec 100 m² de toiture par maison, on a le volume suivant à absorber en plus : 8 x 100 x 0.0342 = 27,36 m3
Il est également important de bien dimensionner le branchement…pour passer 40 l/s, faut aussi mettre un branchement en Ø 200 car en Ø 160, en fonction de la pente et du colmatage, ça peut vite être limite. Idem pour le réseau.
Et si on est en zone urbaine, faut tout reprendre avec une pluie 30 ans.
Approche théorique :
L’ouvrage “Pratique des VRD et aménagement urbain: Voirie et réseaux durables” à la page 482 du chapitre 8.10.5.6, nous précise que le débit engouffré découle de la formule de Torricelli applicable par exemple au débit de fuite d’un bassin de rétention disposant d’une hauteur d’eau h (reprise par l’ingénieur Hydraulicien Régis Bourrier) :
Q = k x S x √(2 x g x h)
Avec :
- kS = C fonction de la géométrie de la grille : C = 0.6 n x s x k
- kS = C fonction de la géométrie l’avaloir : C = 2/3 x √(1/3) x L x h
- Avec : s : section de chacune des n ouvertures de la grille
- k : coefficient d’obturation (0.8 < k <1)
- h : hauteur d’eau considérée (h < 0.10 m)
- g : accélération de la pesanteur – g = 9.81 m/s
En prenant la grille PAM Saint Gobain – grille avaloir AT profil T, sans forcément utiliser la calculette PAM Tools proposer par le fournisseur, nous constatons que la surface d’avalement est de 10.12 dm² donc on a :
s = 10.12 dm² = 0.1 m² car 1 dm² = 0.01 m² ; k = 0.8 (cas le plus défavorable) ; n = 1 ; h = 10 cm = 0.1 m
Q = 0.6 x 0.1 x 0.8 x √ (2 x 9.8 x 0.1) = 0.048 x 1.4 = 0.0672 m3/s = 67 l/s
Les recherches de “Anceaux (1995) et Robert et Tossou (2006)” présentées à Novatech 2010, conduisent à une certaine complexité pour en déduire une application terrain opérationnelle …Cette note nous indique pas de façon pragmatique le positionnement des ouvrages.
En espérant avoir répondu de façon pragmatique à votre interrogation,
Cordialement,
A. FERRON